Les plans initiaux, il faut le reconnaître, sont à l'eau. Les chemins de terre qui relient le Delta à l'Ukraine, du moins ceux qui existaient encore la semaine dernière, ont étés emportés ou rendus dangereux par les inondations. En contournant le delta, on se retrouve à passer deux fois en Moldavie, ce qui implique un visa coûtant 50€ si on est chanceux et deux visas avec un peu de malchance (ou des officiels grincheux). J'ai tenté en vain de trouver un passage de Tulcea ou de Sulina en bateau la semaine dernière. Le ferry n'opère pas en 2009 et reprendra ses activités en 2011. Le catamaran a fait faillite. Un nouveau navire couvrira cet itinéraire à compter de… septembre. L'autobus a été annulé. Le train ne relie pas Constanta à Odessa ; on doit retourner à la capitale Bucarest et prendre un « express » qui refuse les vélos. Il y a des vaisseaux de croisière, très gentils et confortables, qui acceptent de m'emmener à Odessa pour 900€ (couchette et pension comprise, tout de même). L'avion, lui, part de Bucarest, fait escale en Hongrie, n'accepte que les vélos démontés et empaquetés, coûte 350€ (+supplément poids et supplément vélo) et euh… c'est un avion. J'ai fait le tour du port et de la marina au cours des deux derniers jours et personne ne veut m'emmener en Ukraine. Ukraine iz shit, on me dit. Da, da, da. Il ne reste que les camionneurs un peu relaxes sur les règlements qui font un détour par la Moldavie (visa) et un projet ambitieux de détournement de paquebot (prison, savon, bobo). J'ai donc fait, la mort dans l'âme, une croix sur Odessa. Il faut déduire que les relations entre l'Ukraine et la Roumanie sont un petit peu en deçà de fraternelles, disons, euh… courtoises. Une sombre histoire d'île bourrée de pétrole faisant l'objet de revendications des deux côtés. Bref.
En lieu et place, je prends donc mardi à l'aurore un autobus pour le Nord de la Roumanie (oui, yark, un au-to-bus). Ça aurait été marrant de pédaler, évidemment, mais ça aurait ajouté 10 jours au trajet, compte tenu de la présence peu discrète des Carpates. Je me ferai quand même un bout de cette chaîne de montagnes infestée de vampires, en direction de l'Ukraine et du fleuve Prout. Je vais donc en bus vers le Prout, après quoi je suivrai le Prout jusqu'au moment opportun et c'est sans doute une fois en Ukraine que je… passerai le Prout. Vous pouvez bien sûr compter sur moi pour vous offrir gracieusement des photos du Prout dans toute sa splendeur, dès que ça sera possible de me connecter, ce qui promet d'être la galère pour les deux prochaines semaines. En tout cas, je le sens bien, le Prout. Allons… En paix vers le Prout.
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Quelques nouvelles sur les effectifs. Ivan est venu me retrouver dans les derniers jours. Il est parti hier matin, quelques heures avant le grand retour de Vincent, qu'on avait perdu à Budapest. Malheureusement, Vincent est obsédé par la visite d'un territoire qui ne fait plus partie des plans du tout. Il ira donc faire son tour par là-bas (je ne peux pas révéler de quelle région il s'agit car le bougre m'a exorté au secret) pendant que je grimperai vers la Pologne. À partir de là, je compte sur quelques hôtes en Couchsurf et je pourrai rompre le cybersilence. En plus, trois randonneurs pourraient me rejoindre au cours des prochaines semaines. À suivre ! Je ne m'y retrouve pas vraiment moi-même, mais comptez sur moi, ô lecteurs zé lectrices, je poursuivrai… croûte que Prout.